Covid-19: Un espoir? (Forum)
Un espoir contre l’« orage de cytokines » ?
Deux études le montrent, un composé déjà connu, le tocilizumab, serait efficace pour freiner l’emballement du système immunitaire associé au SARS-CoV-2.
une des manifestations les plus terribles du Covid-19 est l’« orage de cytokines ». Ce déferlement de molécules médiatrices de l’immunité, qui trahit une hyperinflammation, détériore nombre d’organes, à commencer par les poumons, à un point tel que les malades en souffrance sont orientés vers les services de réanimation et y succombent parfois. L’une des pistes les plus prometteuses contre le SARS-CoV-2 consiste à administrer des médicaments immunomodulateurs qui refréneraient les ardeurs du système immunitaire. Plusieurs sont à l’essai, et l’un d’eux, le tocilizumab, vient de montrer des résultats encourageants. Ils sont d’abord à lire dans une étude française parue le 22 avril et encore au stade de préprint, c’est-à-dire non encore relue par les pairs. Elle est néanmoins reçue favorablement par la communauté scientifique. Sans doute à raison, car le 29 avril, ces résultats ont été confirmés par l’équipe de Wei Haiming, de l’université des sciences et des technologies de Hefei, en Chine, dont l’étude, annoncée comme préliminaire, a néanmoins été cette fois validée par les pairs.
Le tocilizumab est un anticorps monoclonal (en anglais monoclonal antibody, ce qui explique la terminaison en « mab » des médicaments de ce type), « monoclonal » signifiant qu'il est issu d’une même source et vise une seule et même région d’un antigène. Cet anticorps est d’ordinaire prescrit contre la polyarthrite rhumatoïde, une inflammation chronique des articulations. Son action consiste à bloquer les récepteurs membranaires et solubles de l’interleukine IL6, une cytokine, et donc à en diminuer les effets.
L’IL6 est au cœur de l’« orage de cytokines ». Et deux études chinoises récentes l’ont confirmé, montrant que des quantités importantes d’IL6, de protéine C-réactive (CRP), et de D-dimères dans le sang sont des facteurs de risque de mortalité. La protéine C-réactive et les D-dimères sont deux marqueurs importants de l’inflammation : la première, fabriquée par le foie, active les voies de l’immunité innée visant à l’élimination des agents pathogènes ; les seconds sont issus de la dégradation de la fibrine impliquée dans la coagulation.
On doit la première étude à une équipe de l’hôpital Foch, à Suresnes. En collaboration avec l’université Paris-Descartes, à Paris, elle a testé le tocilizumab sur trente malades, âgés de moins de 80 ans, avec une forme sévère s’aggravant rapidement. Au bout de huit jours en moyenne l’état des malades traités, par rapport à celui du groupe contrôle, s’est notablement amélioré au point de dispenser la plupart d’assistance respiratoire. En outre, très peu d’effets secondaires ont été notés, et le médicament semble bien toléré.
L’étude chinoise concernait quant à elle 20 patients atteints d’une forme sévère. Une journée après qu’ils ont reçu du tocilizumab, la fièvre est tombée. Après cinq jours, la plupart étaient moins dépendants de l’assitance respiratoire, et un malade s’en dispensait complètement. Autre amélioration notable, les taux anormalement élevés de protéine C-réactive dans le sang ont significativement diminué chez plus de 80 % des malades. Tous les patients ont guéri au bout de 10 à 31 jours de traitement, et là encore, aucun effet secondaire ne fut à déplorer.
Ce sont donc bien des résultats encourageants. Même si ceux de l’étude française sont préliminaires, et concernent selon les auteurs de l’étude française, « des malades sélectionnés avec soin », ils invitent à poursuivre les investigations dans cette voie. Les médecins chinois sont plus confiants, affirmant en conclusion de leur article que le tocilizumab est bien un traitement efficace contre les formes sévères de Covid-19. Plusieurs essais cliniques à plus large échelle sont en cours pour s’en assurer pleinement.
https://www.pourlascience.fr/sr/covid-19/un-espoir-contre-l-orage-de-cytokines-19354.ph...