Legault trop mou envers les têtes brûlées. (Forum)
Le Québec en mou
Le Québec a l’un des pires bilans au monde, mais on joue encore au touch football avec le coronavirus.
On n’est pas seulement habillés « en mou ». On est mous.
Ne voit-on pas ce qui se passe en Europe ? La France détecte ces jours-ci quotidiennement un nombre de cas supérieur au sommet du printemps. C’est pourtant un pays où le gouvernement prend la situation sanitaire très au sérieux. Je veux dire : il n’y a pas de négationnistes, comme chez plusieurs dirigeants américains.
On dirait qu’on a oublié le principe mathématique de la contagion. Les courbes exponentielles. Ça commence toujours par un seul cas… Puis deux… Puis quatre…
La ville de Québec, largement épargnée, est maintenant dans une zone « jaune ». Tout ça à cause d’un bar de karaoké. Un bar, 80 cas.
Parlons-en, de cette charte de couleurs, inspirée des niveaux d’alerte pour les risques d’incendies de forêt.
Vert, jaune, orange, rouge…
Montréal est au vert. Vraiment ?
AUCUNE région n’est au vert. Juste le concept de feu vert envoie le mauvais signal. C’est vert ? On y va !
On est tous au moins au jaune. Parce que le virus est présent.
J’ai l’air de chipoter sur une pauvre charte de couleurs. Mais ce n’est qu’un exemple du double discours, ou du parler-mou des autorités. D’un côté, on déplore les relâchements. De l’autre, on prend des demi-mesures.
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Conférence de presse extraordinaire, jeudi matin, 8 h 30. Le premier ministre du Québec, flanqué du ministre de la Santé et des Services sociaux, va annoncer quelque chose d’important.
Quoi ?
Des pouvoirs policiers pour arrêter et mettre à l’amende des récalcitrants du masque.
C’est tout ?
C’est tout.
Est-ce vraiment ça, le problème, les agités du bocal qui refusent de porter un masque ?
Pourtant, comme l’a dit François Legault, et comme vous avez pu le constater si, comme moi, vous vous êtes promené un peu au Québec, on ne fait pas face à un énorme problème de délinquance anti-masque. Tout le monde porte son masque à l’épicerie, dans les commerces, etc. Et les quelques étourdis, hurluberlus ou militants qui ne voudraient pas en porter se font regarder, dire de le faire, expulser.
Un propriétaire de commerce a déjà le droit d’appeler la police si quelqu’un ne respecte pas le règlement.
Enfin, je n’ai rien contre la simplification de la procédure policière et le fait d’envoyer un message musclé aux récalcitrants pour qu’ils aillent récalcitrer plus loin à leurs frais.
Mais voyez pendant ce temps avec quelle rapidité la Colombie-Britannique a réagi à une flambée de cas cette semaine. Fermeture des discothèques, limitation des heures d’ouverture des bars, limite du niveau sonore. Une flambée qui n’est pas supérieure à notre nombre de cas récents.
Le Québec a tout de même enregistré la moitié de tous les cas au Canada et déploré plus de morts par habitant que presque tous les pays du monde, y compris les « terribles » États-Unis.
On nous dit : oui, mais si on exclut les CHSLD, c’est pas si mal…
Comme si les gens qui y sont hébergés ne comptaient pas ! On serait donc les seuls à avoir des vieux, des vieux malades ?
Quelles qu’en soient les raisons, ces constats somme toute catastrophiques devraient faire de nous des hypervigilants. Des… plus rigoureux, disons ?
Mais non.
Pourtant, plus le virus se répand, plus il risque de retourner visiter les CHSLD. Oui, les procédures sont plus scrupuleuses. L’équipement, meilleur. Les gens, mieux formés. Mais la logique du printemps est toujours en vigueur : au bout de la chaîne de transmission, ce sont les milieux fragiles qui vont écoper.
On parle de quelques petits ajustements, de registres. C’est bien, les registres. C’est bien d’avoir l’adresse courriel du client. Mais y en a qui mériteraient un coup de registre en arrière de la tête.
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Je ne suis pas en train de suggérer un nouveau confinement. Je plaide pour quelques mesures afin d’en éviter un autre. Pour que les écoles restent ouvertes.
Ça veut dire quoi ? Ça veut dire un ton plus dur. Ça veut dire plus de lucidité.
Les Québécois sont capables d’en prendre. La preuve : ils se plient aux consignes.
Mais à ce qu’on sache, les éclosions ne sont pas venues d’un anti-masque dans un IGA. Elles sont venues de partys, elles sont venues de bars, endroits où, par définition, l’alcool ramollit les suiveurs de consignes, stimule les hurlements, rapproche les corps et répand les liquides corporels.
Qui a bu aboiera, comme vous savez.
C’est maintenant qu’il faut serrer la vis, cibler les vrais enjeux, limiter le nombre de personnes dans les endroits clos. Et tester, tester, tester plus que tout le monde au Canada – ce qui est loin d’être le cas en ce moment.
On doit faire mieux.
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