Le roi charbon tient bon (Forum)
Aweille Sort la pépine, creusons davantage de mines au Charbon pour les voitures électriques... avec le duo mines de lithium subventionné$ avec de l'argent risqué par notre courageux ministre des finances...
https://www.ledroit.com/chroniques/lise-ravary/2023/06/27/le-roi-charbon-tient-bon-XSLS...
Le roi charbon tient bon
Par Lise Ravary
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27 juin 2023
Tuer l’industrie du charbon est plus facile à espérer qu’à conclure.
Tuer l’industrie du charbon est plus facile à espérer qu’à conclure. (123RF/123RF)
Dans notre cocon tissé à l’électricité, nous ne passons pas beaucoup de temps à se demander comment d’autres pays moins bien pourvus que nous en énergies vertes préparent-ils leur transition énergétique.
Or, cela devrait nous empêcher de bien dormir la nuit.
J’apprenais cette semaine, en lisant le magazine The Economist, que le charbon fait un retour en puissance pour le moins inattendu alors que s’installe une conscience environnementale mondiale, tout simplement parce que des gens puissants continuent de s’enrichir grâce à ce que les anglo-saxons appellent King Coal, le roi charbon.
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Et leurs complices tout à l’argent sont nombreux.
Tuer l’industrie du charbon est plus facile à espérer qu’à conclure. Même un pays comme l’Australie fait ses choux gras en exportant le charbon abondant dans son sous-sol. La Chine demeure un de ses gros clients, sinon le plus important, malgré les tensions entre les deux pays et pour cause : la Chine construit des centrales thermiques au charbon qui produiront 270 gigawatts d’ici 2025, plus que n’importe quel autre pays au monde, nous apprend The Economist.
D’ici deux ans, la Chine va consommer quatre milliards de tonnes de charbon à elle seule sur un total de huit milliards de tonnes, à travers le monde. Les États-Unis arrivent au quatrième rang des pays utilisateurs de charbon.
L’Inde, 2e plus grand consommateur au monde, dépend du charbon pour sa phénoménale croissance. Comme de nombreux pays émergents en Asie du Sud-est, notamment le Vietnam. À ce stade-ci de leur histoire, on peut se demander «ont-ils vraiment le choix ?». Mais qu’en est-il de l’humanité ?
Pendant ce temps, un pays qui a le choix, la Grande-Bretagne, ce berceau de la Révolution industrielle devenu un des pivots de la révolution verte, va inaugurer sa première mine de charbon en 30 ans dans le nord de l’Angleterre, faisant fi des objections qui ont fusé de toutes parts. Le gouvernement conservateur va de l’avant, la conscience tranquille puisque la mine fermera en 2049, un an avant la cible carboneutre de 2050.
Quel cynisme.
Malgré le retrait en Occident de nombreux investisseurs des énergies fossiles, les entourloupettes ne manquent pas. Les pays producteurs, l’Indonésie, l’Afrique du Sud et l’Australie investissent dans leurs économies, on doit s’y attendre. Mais il n’y a pas qu’eux. Comptons aussi sur les banques suisses et japonaises et celles de Singapour pour garder le roi charbon bien au chaud sur son trône.
The Economist rapporte aussi que ses clients qui font le commerce du charbon ont vu leurs profits se multiplier par dix en 2022.
Difficile de déterminer si des banques canadiennes investissent dans la production de charbon comme tel – cinq grandes mines prospères sont toujours en exploitation au Canada – mais on sait que les cinq plus grandes banques – RBC, BMO, CIBC, TD et Scotiabank - ont investi un trillion de dollars, toutes énergies fossiles confondues depuis 2016, l’année de la signature des Accords de Paris.
La Banque royale mènerait le bal avec des investissements de 56,6 milliards de dollars en 2022, principalement dans les sables bitumineux de l’ouest canadien, selon le récent rapport Banking on Climate Chaos.
Il n’y a pas de quoi pavaner, mes amis.
Le marché pour le charbon est concentré en Asie mais les États-Unis en consomment toujours en grande quantité. Des industries super énergivores comme la fabrication du ciment et de l’acier peinent à s’en passer car le charbon produit plus de chaleur à moindre coût que les autres sources thermiques.
Le tabou du charbon est tombé quand l’Allemagne a décidé de fermer ses centrales nucléaires après la catastrophe de Fukushima en 2011. Elle en brûle désormais pour compenser ces pertes. Sans compter les perturbations énergétiques causées par la guerre en Ukraine qui ont mis un frein à l’importation de gaz russe.
En d’autres mots, une fois mal pris, même un pays occidental progressif – là où des Verts ont été élus avant tout le monde - va se tourner vers la source d’énergie la plus polluante sur terre pour combler ses besoins primaires. Imaginez les scénarios dans la tête des financiers de l’enfer.
(Il faudra bien un jour parler du nucléaire autrement qu’en évoquant Tchernobyl car de plus en plus d’environnementalistes y voit la porte de sortie permanente des énergies fossiles si le but est de conserver notre niveau de vie actuel.)
Quand le charbon va-t-il enfin tirer sa révérence ? Quand les énergies renouvelables prendront la relève, soit dans les années 2040, croit The Economist qui dénonce les opportunistes du charbon.
Quand je regarde la fumée des feux de forêts du nord québécois qui a envahi mon patelin, deux pensées m’assaillent : que se passe-t-il dans la tête des individus qui font le choix de financer, et d’extraire et de brûler du charbon en 2023 et, l’autre question, existentielle celle-là : va-t-on se rendre en 2040 ?